Ensembles de petite somme
Abstract
Ruzsa a démontré une minoration précise de la mesure de la somme de deux ensembles bornés de réels et faisant intervenir le ratio . De Roton a établi un résultat de structure à propos des ensembles critiques de cette minoration. Ici, nous prouvons une généralisation du travail de de Roton en établissant un résultat dans un voisinage du cas d’égalité.
1 Introduction et résultat
Si et sont deux ensembles bornés non vides de réels, il est bien connu (cf. [3]) que
Si cette inégalité est optimale pour certains ensembles et (si ce sont des intervalles par exemple), il est en revanche possible d’être plus précis en toute généralité en faisant intervenir le ratio et le diamètre de .
Dans la suite, et seront deux ensembles fermés bornés de réels de mesures non nulles. On notera le diamètre de et on désignera par l’unique couple défini par
(1.1) |
Ruzsa [5] a démontré le théorème suivant.
Théorème 1.1 (Ruzsa).
Soient deux ensembles bornés non vides tels que . Notons le diamètre de et défini par (1.1). On a
La minoration du théorème 1.1 est également optimale et de Roton a étudié l’un des cas d’égalité (cf. [2]).
Théorème 1.2 (de Roton).
Soient deux fermés bornés tels que . Notons le diamètre de et défini par (1.1). Si
alors et sont des translatés d’ensembles et de la forme
où et .
![]() |
Dans cet article, nous nous intéressons au voisinage de ce cas d’égalité, lorsque
pour un petit . Nous verrons alors que, si est suffisamment petit, et sont respectivement inclus dans des translatés de voisinages de et (où et sont les ensembles définis dans le théorème 1.2). Ce résultat fait l’objet du théorème 1.3 ci-après.
Théorème 1.3.
Soient deux ensembles fermés, bornés, de mesures non nulles et tels que , où désigne le diamètre de . Soit définis par (1.1). Si et
pour tel que
où , alors est inclus dans un translaté de où et , et est inclus dans un translaté de , où
Remarque 1.4.
et sont de même mesure donc est un voisinage métrique assez fin de .
La borne provient d’un théorème de Candela et de Roton [1] (théorème 1.5 ci-après) dont nous allons nous servir dans ce travail, et qui étend le théorème de Kneser [4] aux ensembles presque critiques dans le tore .
On note la mesure de Haar intérieure sur le tore () et pour tout ensemble et tout scalaire , on pose
Théorème 1.5 (Candela et de Roton).
Soit où . Soient satisfaisant
et . Alors il existe trois intervalles , avec fermés et ouvert, et un entier naturel non nul tels que , , , et , , .
Toute amélioration de la borne qui provient d’un résultat dans (le corps fini à éléments) de Grynkiewicz, améliorera automatiquement le domaine de validité de notre résultat. On conjecture que peut atteindre .
Remarque 1.6.
Dans le théorème 1.3, nous avons supposé et fermés mais quitte à considérer des ensembles fermés et tels que , et , on peut supposer et seulement Lebesgue-mesurables.
2 Preuve du théorème 1.3
La démonstration qui reprend les idées et la structure de la preuve développée par de Roton dans le cas d’égalité [2], comportera principalement trois étapes. La première consistera à travailler modulo le dimaètre de puis à utiliser l’inégalité de Ruzsa et le Théorème 1.5 afin de montrer que nos ensembles sont proches de progressions arithmétiques d’intervalles. La deuxième consistera à prouver que est finalement proche de l’union de deux intervalles seulement. La troisième permettra de dégager la structure de . Dans le cas d’égalité, les sous-ensembles sont des intervalles, alors que nous avons des "erreurs", les sous-ensembles ne remplissent pas entièrement les intervalles et il pourra y avoir des décalages, ce qui complique chaque étape et ajoute des contraintes. Notamment pour la dernière étape, il nous faudra établir la structure de en trois temps. Tout d’abord, nous dégagerons la structure principale de , qui contient la grande majorité des éléments de , puis nous exhiberons des informations sur le reste des éléments de . Nous finirons par affiner ces informations en retrouvant un point de vue plus global.
2.1 Hypothèses
Notons tout d’abord que quitte à translater et et normaliser , on peut supposer que et sont deux fermés de mesure non nulle tels que , , et . Soient et tels que
(2.1) |
Remarque 2.1.
Notons que est nécessairement supérieur ou égal à car par hypothèse.
On suppose que où est un réel positif tel que
(2.2) |
(2.3) |
(2.4) |
et . En fait nous n’aurons besoin que de l’hypothèse plus faible suivante
(2.5) |
ce qui entraine en particulier
(2.6) |
2.2 Mesures modulo le diamètre de
Posons . Pour tout entier positif et tout sous-ensemble de on définit
Notons que et , où désigne la projection de dans . Tout au long de la preuve du théorème 1.3, nous allons utiliser le fait que pour tout ensemble borné , on a
(2.7) |
Ruzsa (cf. [5] ou le lemme 1 dans [2]) a utilisé cette égalité afin de prouver l’inégalité suivante. Si , on a
(2.8) |
Remarque 2.2.
Comme , on utilisera indifféremment et pour désigner la mesure de . On pose
Nous sommes désormais prêts à entamer la première étape. Tout d’abord, montrons que
(2.9) |
où est défini par (2.1).
Preuve.
Cette première égalité va nous permettre, en reprenant la preuve de l’inégalité (2.8) de Ruzsa, d’obtenir des contrôles sur les inégalités entre les mesures d’ensembles modulo . Ainsi nous saurons que ces inégalités sont proches du cas d’égalité, ce qui nous permettra d’utiliser le théorème 1.5 et ainsi obtenir des informations de structure modulo sur nos ensembles.
2.2.1 Structures de et modulo , premières informations
Par l’hypothèse (2.1) et d’après (2.9), on a
Définissons , et par
(2.10) |
Comme (car ) et comme on a pour tout et . De plus en utilisant
Ainsi nécessairement
(2.11) |
donc en particulier
(2.12) |
et donc pour tout
(2.13) |
Pour tout , on a également
(2.14) |
et pour tout on a
(2.15) |
Enfin plus brutalement, on a aussi
(2.16) |
où la deuxième inégalité provient de l’hypothèse (2.4). Comme pour tout , , on a d’après la deuxième ligne de (2.10)
Grâce aux hypothèses (2.2), (2.3), (2.4) et (2.6), nous pouvons appliquer le théorème 1.5 et ainsi, pour tout , il existe un entier et deux intervalles et dans tels que , avec
On choisira pour l’enveloppe convexe de et pour celle de dans . Ceci termine la première étape de la preuve. Dans la suite, nous allons montrer que pour tout , ce qui implique que est contenu dans un intervalle de qu’il remplit presque.
2.3 modulo est proche d’un intervalle
Commençons par prouver que ne dépend pas de . C’est à dire, montrons que pour tous et appartenant à .
Lemme 2.3.
Il existe un entier tel que pour tout on ait , où et sont des intervalles tels que
Preuve.
Il s’agit de prouver que pour tout . Tout d’abord par (2.15) puis par (2.6), on a
(2.17) |
On va supposer qu’il existe des entiers et tels que . On sait que et avec
Comme et contiennent tous deux , on a
Ainsi d’une part, on a
(2.18) |
D’autre part dans , est composé de intervalles de taille uniformément espacés (deux centres consécutifs sont distants de ). De même est composé de intervalles plus petits (de taille ) dont les centres sont distants de (). Pour obtenir une absurdité, on montre qu’une proportion importante des centres des intervalles composant ne sont pas dans , ce qui provient du fait que la taille de est supérieure à celle de (cf. (2.17)). On utilise ensuite que si un centre d’un intervalle de est dans , alors , ce qui provient du fait que la distance entre deux intervalles consécutifs de est supérieure à la taille d’un intervalle de . On obtient ainsi l’inégalité (non optimale mais suffisante) , ce qui contredit (2.18) (par l’hypothèse (2.2)).
La première étape est moins immédiate que les suivantes. Deux cas sont en effet à distinguer. Si deux centres consécutifs d’intervalles de sont dans (sinon, la moitié au moins des centres est dans ), alors soit ces deux centres sont dans le même intervalle de , auquel cas un ensemble de centres consécutifs dans succède à un ensemble de centres consécutifs dans
![]() |
soit ces deux centres sont dans deux intervalles consécutifs de , auquel cas les centres vont se décaler vers le bord droit des intervalles de jusqu’à sortir de et il faudra alors au moins presque autant de décalages (donc de centres consécutifs) hors de pour atteindre à nouveau .
![]() |
∎
On montre ainsi que ne dépend pas de 111Le lecteur intéressé pourra consulter https://hal.univ-lorraine.fr/tel-03368154v1 où les détails de cette étape sont donnés.. Commençons par estimer , et . Posons . Par construction contient , et de plus on a
d’où par (2.15)
(2.19) |
Enfin comme (cf. preuve du lemme 2.3), on a également
(2.20) |
Lemme 2.4.
On a
Preuve.
Un encadrement précis de la mesure de découle directement de ce lemme et fait l’objet du corollaire suivant.
Corollaire 2.5.
On a
et donc en particulier
Preuve.
À présent afin de simplifier l’argumentation, on va translater afin qu’il soit suffisamment loin de . Maintenant que nous savons que ne dépend pas de , et comme quel que soit , on a
Ainsi, comme est l’enveloppe convexe de , quel que soit on a
(2.22) |
Par (2.21), le lemme 2.4 et l’hypothèse (2.6), on a
donc d’après le lemme 2.3, on a
Ainsi il existe tel que et donc, quitte à translater par , on peut supposer que . En effet, quel que soit , on a
De cette manière, et par (2.22), on peut supposer que
(2.23) |
quel que soit . En particulier, et .
Nous allons désormais montrer que .
2.3.1 Premières informations et début de la stratégie pour montrer que
Rappelons que désigne la projection de sur . Pour plus de lisibilité, posons et
Écrivons où est un intervalle fermé de et un intervalle fermé de (bien définis car par hypothèse, et d’après (2.20)). On pose et . Supposons que . Comme
où , et ().
Par (2.23), et donc est un intervalle de .
On a donc simplement où et .
Écrivons où . Remarquons que pour tout tel que , et , on a . Enfin posons et . On rappelle que , que et que .
![]() |
contient tous les morceaux non vides de mais donc également ceux de très petite mesure. Nous allons également avoir besoin de nous concentrer sur les morceaux offrant une certaine contribution au niveau de la mesure. Pour celà, on pose
où est une fonction qu’on optimisera, , et est le plus gros "morceau" de , c’est à dire tel que .
![]() |
Remarque 2.6.
Ainsi grâce à cette hypothèse, on a bien Finalement, quel que soit , on a bien , donc pour tout . Ainsi on a
Ainsi, on a
(2.24) |
Pour pouvoir conclure avec cette stratégie, nous avons besoin d’une minoration de , de et de . Ce qui nous amène aux lemmes de la partie suivante.
2.3.2 Minoration de , et
Les minorations de et font chacune l’objet de l’un des deux lemmes suivants mais pour obtenir le moins de contraintes possible, nous différencierons deux cas pour la minoration de . Ainsi nous allons établir deux minorations de , une valable quand est grand et l’autre valable quand est petit. Elles feront l’objet des deux derniers lemmes de cette partie. Nous n’aurons alors qu’à appliquer la minoration correspondante suivant la taille de afin d’obtenir une absurdité dans le cas en ayant le moins de contraintes possible.
Lemme 2.7.
Si et est le plus gros "morceau" de , c’est à dire tel que
, on a
Preuve.
Rappelons qu’on a supposé . De plus, et . D’où
∎
Lemme 2.8.
Si et , on a
Preuve.
On a , et (), donc et pour tout et ainsi
d’où . Comme , on a et donc finalement
∎
Pour établir les deux minorations de (suivant la taille de ), nous allons avoir besoin de quelques estimations. Commençons par quelques définitions. On pose
-
•
(), où ;
-
•
et ;
-
•
et
-
•
pour tout ;
-
•
.
![]() |
Nous allons donner une minoration de , de puis de . Par définition de , pour tout , on a
(2.25) |
D’autre part
d’où
(2.26) |
De plus
d’où et donc finalement
(2.27) |
Nous allons également avoir recourt à la majoration de suivante.
(2.28) |
En effet, on a
Or donc
Mais car par hypothèse et (cf. remarque 2.1). Ainsi et donc . D’où finalement
Nous pouvons désormais établir les deux minorations de . Le lemme suivant va nous donner une bonne minoration de quand est assez petit.
Lemme 2.9.
Si et , on a
Preuve.
et . Par (2.26), on a et donc car par hypothèse du lemme. De plus, comme est un entier inférieur ou égal à par définition, on a
(2.29) |
Ainsi les morceaux de sont non vides et ils résultent chacun d’une contribution d’au moins morceaux de (par définition de ) et donc va contenir au moins éléments. En effet, par (2.25), on a
d’où, d’après (2.29)
(2.30) |
Ainsi, d’après (2.30) et (2.28), on a
(2.31) |
De cette manière, en reprenant nos calculs, on a et donc nécessairement, comme d’après (2.29), pour tout on a , ce qui implique finalement, pour tout
(2.32) |
En particulier, pour tout , on a pour tout
et donc . De cette manière , d’où
(2.33) |
Finalement, avec (2.27), on obtient la minoration ∎
Nous pourrons utiliser cette minoration de si est suffisamment petit et il nous restera donc à traiter le cas où est grand. Pour cela, nous utiliserons une autre minoration de qui fait l’objet du lemme suivant.
Lemme 2.10.
Si et , on a
où est telle que et est à optimiser.
Preuve.
On a et . Nous allons avoir besoin de définir des objets similaires à ceux apparaissant dans la preuve du lemme précédent. On pose (), où . Soit une fonction positive telle que que nous déterminerons plus tard. Rappelons que et que par (2.25), pour tout , on a Ainsi pour tout , on définit Par (2.28), on a
Ainsi et, en utilisant (2.26), on obtient
(2.34) |
Enfin on pose pour tout
Ainsi pour tout on a
d’où
Et finalement
où la troisième inégalité utilise (2.27) et la quatrième (2.34). Ainsi
Enfin on conclut en utilisant (2.15)
∎
Cette minoration de est moins bonne que la précédente mais nous ne l’utiliserons que lorsque est supérieur à et nous pourrons donc utiliser l’inégalité pour pallier cette perte.
Toutes nos minorations sont établies, nous sommes désormais en mesure de conclure. Comme nous l’avons expliqué dans la partie précédente, nous allons distinguer deux cas suivant la taille de .
2.3.3 Preuve de lorsque
Nous allons raisonner par l’absurde et on suppose donc dans cette partie que et nous pourrons donc utiliser le lemme 2.9. Rappelons l’inégalité (2.24)
et donc avec les lemmes 2.7, 2.8, 2.9, et l’hypothèse , on obtient
Ainsi en utilisant le corollaire 2.5, on a
Finalement, on a donc
Ainsi par (2.15)
et comme on a supposé
Pour aboutir à une absurdité, on voudrait que le terme de gauche soit le plus petit possible, ce qui nous conduit à choisir (ce qui ne pose pas de souci, cf. remarque 2.6). On obtient alors
(2.35) |
Or d’autre part, par l’hypothèse (2.2), donc
ce qui contredit (2.35) et nous donne donc l’absurdité. On ne peut donc pas avoir et donc nécessairement .
2.3.4 Le cas est impossible
On suppose donc ici que est supérieur ou égal à et on pourra donc utiliser le lemme 2.10. Rappelons l’inégalité (2.24)
donc avec les lemmes 2.7, 2.8, 2.10, et l’hypothèse , on obtient
Ainsi en utilisant le corollaire 2.5, on a
Finalement, on a donc
Ainsi
et comme on a supposé , on a
où la dernière inégalité provient de (2.15) et du corollaire 2.5. Ainsi
Pour aboutir à une absurdité, on voudrait que le terme de gauche soit le plus petit possible, ce qui nous conduit à choisir et .
Remarque 2.11.
On peut faire ce choix car on a bien pour tout et tout
-
•
.
-
•
, cf. remarque 2.6.
Ainsi , et donc est inclus dans un intervalle de . Comme il contient , nous connaissons la structure de dans :
où , , et .
Voici un exemple de ce à quoi peut ressembler :
![]() |
D’après (2.15), en particulier on a et donc
(2.36) |
(2.37) |
et
(2.38) |
2.4 Structure principale de A
Comme conclu précédemment, on a où , , et . De même, est inclus dans un intervalle de , qui lui, ne contient pas (cf. (2.23)). Ainsi où , et . On rappelle que , que pour tout , et que pour tout , on a défini par
Nous utiliserons fréquemment la remarque suivante. Pour tout ensemble mesurable et borné, on a
(2.39) |
Nous allons commencer par déterminer l’emplacement des éléments de se projetant modulo sur . Par définition, chaque élément de s’exprime dans étages différents de . Ici, on appelle "étage", tout segment entre deux entiers consécutifs. Il s’agit de déterminer ces étages en premier lieu.
Dans un second temps, nous résoudrons la même question pour tous les ensembles jusque afin d’obtenir la structure principale de .
2.4.1 Étape 0 : contribution de dans
Lemme 2.12.
Il existe tel que
Preuve.
On a où . Donc pour tout , il existe tel que et . Soit un tel et supposons sans perdre en généralité que . Soit , on a d’un côté
où on rappelle que . De l’autre côté,
Notons que le fait que les segments puissent être vides ou que les membres de droite puissent être négatifs ne pose pas de problème pour la suite de l’argumentation. Ainsi
Or d’après (2.10) et le lemme 2.4, on a
Ainsi
par (2.11), (2.14), (2.15) et l’hypothèse (2.3). Ainsi . Mais donc et . Donc
et de proche en proche, on obtient quel que soit . Comme , et quel que soit , alors
D’autre part d’où , ce qui implique que est composé d’entiers consécutifs. Et donc finalement, il existe tel que ∎
Nous venons de montrer que .
Afin de traduire sur et les informations dont nous disposons sur et , nous définissons les "projetés inverses" et comme suit : Pour tout sous-ensemble de on pose
et . Avec ces définitions, on a directement
(2.40) |
et avec le lemme 2.12
(2.41) |
Ces égalités sont claires car mais pour tout entier , l’égalité devient
(2.42) |
En effet est l’ensemble des éléments de qui se répètent au moins fois modulo , c’est donc la réunion disjointe, pour variant de à , des ensembles des éléments de qui se répètent exactement fois modulo . La mesure de l’ensemble des éléments de qui se répètent exactement fois modulo est égale à , et ainsi on a
ce qui prouve la formule car .
De même, pour tout entier , on a la formule
(2.43) |
Preuve.
Il suffit de suivre le même procédé puis d’utiliser
∎
Nous pouvons écrire sous différentes formes
et donc en particulier on a .
2.4.2 Stratégie et Étape 1 :
Écrivons où et quel que soit
Nous allons comparer à l’ensemble où et pour tout
Voici une représentation de pour :
![]() |
est au étages de , puis pour tout , est l’ajout de à droite de chacun des premiers étages de et de à gauche de chacun des derniers étages de . Il faut le voir comme un ensemble "idéal" (sans petit trou) proche de l’ensemble des théorèmes 1.2 et 1.3.
Pour comparer et , nous montrerons que pour tout , et sont très proches. Tout d’abord, on a et donc et donc
(2.44) |
De plus donc . Pour les autres indices, le raisonnement sera similaire bien que plus technique.
2.4.3 Étapes suivantes.
Soit , on a et
Pour montrer que ces deux ensembles sont proches, nous commençons par montrer que est proche de
En effet, (2.10) impliquera que chacun de ces deux ensembles est proche de . Nous allons donc contrôler puis pour pouvoir contrôler et finalement . Lors des première et troisième étapes, nous utilisons le fait que si et sont deux ensembles bornés tous deux inclus dans (borné également) alors
(2.45) |
- 1.
- 2.
- 3.
-
4.
Minoration de
Soit . Comme et , on a . De plus, donc . Or donc et donc finalementet donc nécessairement est composé d’entiers consécutifs. Or est également composé d’éléments à des étages consécutifs par construction et , donc si
Finalement
Ainsi pour tout
et donc
(2.49) |
car par (2.10).
2.4.4 Conclusion : Structure principale de .
Nous sommes désormais en mesure de donner une localisation précise de la majorité des éléments de . Rappelons que et qu . Par (2.44) et (2.49), on a
Or après calculs et en utilisant (2.11) on peut obtenir l’inégalité
et donc
Enfin par (2.15), on obtient
(2.50) |
On a donc montré que était principalement inclus dans
Or par le corollaire 2.5 puis par (2.11)
Ainsi et
où . Notons que l’hypothèse (2.6) implique que la réunion est bien disjointe. Pour plus de clarté, nous redéfinissons en ce nouvel ensemble :
Voici une représentation de pour .
![]() |
2.5 Structure totale de A
2.5.1 Stratégie et premiers résultats
La partie précédente démontre qu’il existe un réel tel que
où
Ainsi l’essentiel de se concentre dans cette réunion d’intervalles . Nous allons désormais prouver que tous les éléments de sont inclus dans un petit voisinage métrique de . Commençons par établir une minoration de la mesure de .
Lemme 2.13.
On a
où .
Preuve.
Établissons maintenant un contrôle de la contribution de à .
Lemme 2.14.
Soit . On a
Preuve.
Le lemme 2.14 nous donnera un contrôle de l’erreur commise en remplaçant par . Il permettra en particulier pour de contrôler la contribution de hors de et de conclure que est proche de . Nous sommes donc parés pour exhiber une région limite autour de en dehors de laquelle aucun élément de ne peut se trouver. Commençons par établir une région limite autour de .
2.5.2 Le cas des éléments de
On rappelle que
et on pose pour tout
de sorte que (on peut voir comme le -ème étage de ).
![]() |
Nous allons commencer par montrer que les éléments de ne peuvent pas être trop inférieurs à .
Lemme 2.15.
Soit tel que , on a nécessairement
où on rappelle que .
Preuve.
Soit tel que . D’après le lemme 2.14, on a
(2.51) |
car par l’hypothèse (2.2), on a . Ainsi nécessairement . De plus, comme et , et donc ne peut intersecter que les deux premiers morceaux de
(car on a par construction ). Aussi, donc
et comme , , et donc on a
Nous allons discuter selon la taille de . Commençons par une remarque : sous l’hypothèse (2.2), on a , ce qui implique quel que soit
(2.52) |
A) Premier cas : .
Si , par (2.51), on a
or comme , et , on a
Ainsi comme par (2.37), on a
B) Second cas : .
Si , alors par (2.52) et donc nécessairement par le lemme 2.14, on a
On rappelle que par construction , il y a donc trois possibilités :
a) et
b) et
c) et
que nous allons traiter séparément.
a) le cas est impossible.
![]() |
En effet, pour qu’on soit dans cette configuration, il faudrait que l’écart entre les deux premiers morceaux de soit inférieur au diamètre de , or nous sommes dans le second cas et est petit donc les deux premiers morceaux et sont petits et donc l’écart entre eux est grand. C’est l’idée que nous allons développer ici.
On suppose donc que et . Ainsi nécessairement, et donc par (2.45)
Or
Ainsi
et donc finalement par le lemme 2.14 et parce qu’on est dans le cas B
ce qui contredit (2.52). Ce cas de figure est donc impossible.
b) le cas est impossible.
On suppose par l’absurde que est tel que , et
![]() |
Commençons par voir que . Supposons que ce ne soit pas le cas. Comme , la distance entre et est inférieure à la mesure de car est un intervalle.
![]() |
Or et . Donc
par (2.36), donc comme par l’hypothèse (2.6), on a en utilisant ,
ce qui contredit l’hypothèse (2.2) quel que soit . Ainsi on a bien . Donc d’après le lemme 2.14,
or par construction de puis par (2.37) puis parce qu’on est dans le cas B, on a
Ainsi
ce qui contredit l’hypothèse (2.3). Finalement, on doit donc avoir :
c) .
![]() |
Le lemme 2.14 assure que mais comme et , on a
Ainsi
Finalement, soit est non vide et
d’où
Soit est vide et
d’où
Cette inégalité est donc valable dans tous les cas, ce qui termine la preuve. ∎
Traitons désormais le cas des éléments supérieurs à .
Lemme 2.16.
Soit tel que , on a nécessairement
où on rappelle que .
Preuve.
La preuve est immédiate en utilisant la transformation définie par
et le lemme 2.15. Il faut simplement veiller à ce que , ce qui est bien le cas222Pour plus de détail voir https://hal.univ-lorraine.fr/tel-03368154v1 où l’argument y est développé.. ∎
2.5.3 Le cas des éléments de dans pour
Lemme 2.17.
Si et si est un élément de tel que , alors
où on rappelle que
Preuve.
Soit et . On peut supposer que . Sinon cela signifie que et donc quitte à appliquer , on se ramène à . Nous allons raisonner par l’absurde, supposons que , ce qui implique que
et donc
On a
(2.53) |
Or on rappelle que le lemme 2.14 donne la majoration
Nous allons voir que ces deux dernières inégalités sont en contradiction. Pour cela nous allons distinguer les quatre configurations possibles :
-
•
et
-
•
et
-
•
et
-
•
et
et nous allons voir que quelle que soit la configuration dans laquelle on se trouve, est supérieur à ce qui nous conduira donc à une absurdité.
Cas 1 :
![]() |
Dans ce cas on a alors , et donc
Or , car par l’hypothèse (2.2) et quel que soit . Ainsi finalement
Cas 2 :
![]() |
On rappelle ici que et (cf. (2.37)), donc
or
où la dernière ligne provient de l’hypothèse (2.5). Ainsi finalement
Cas 3 :
![]() |
On a
et comme , et , on a
c’est à dire
Cas 4 :
![]() |
Ce cas est similaire au précédent et on a
Ainsi quel que soit le cas dans lequel on se trouve, on obtient toujours une contradiction du lemme 2.14 et donc l’absurdité. Ainsi ce qui termine la preuve de ce lemme. ∎
2.5.4 Affinement
Pour tout , on pose et pour tout , on pose
et
On a donc
et donc . Ainsi il existe tel que
Lemme 2.18.
Quel que soit , est inclus dans un intervalle de mesure .
Preuve.
Soit . Commençons par donner une majoration de la mesure de . Par l’hypothèse (2.5), pour tout , on a et . De plus, quel que soit , et donc en particulier . Ainsi
or par hypothèse, donc
De plus, comme , on a . Ainsi, par l’hypothèse (2.4), on a
(2.54) |
D’autre part, on a
Or encore une fois, par hypothèse, donc
d’où par (2.54)
(2.55) |
De même, on a les inégalités
qui entraînent par (2.54)
(2.56) |
Comme , au moins l’une des inéquations (2.55) et (2.56) nous permet d’utiliser le théorème 1.5. Sans perdre en généralité, supposons donc que . Par (2.56) et d’après le théorème 1.5, il existe tel que , , et . Cependant, donc d’après le lemme 2.3, nécessairement . Finalement, et par définition de , on a
∎
Ce lemme signifie que chaque morceau de ne peut pas être plus gros que le morceau de correspondant plus . Il reste à montrer plus précisément que . Commençons par donner une majoration de pour tout , ce sera l’objet du lemme 2.20 ci après.
Quel que soit , on rappelle qu’on a posé , on pose également . Rappelons qu’on a
Ainsi, par le lemme 2.18, on a
(2.57) |
Ruzsa [5] a prouvé le lemme suivant.
Lemme 2.19 (Ruzsa).
Soient et deux ensembles bornés, non vides de réels. On a soit
soit
où est l’entier naturel défini par
Quitte à appliquer , on peut supposer que .
Lemme 2.20.
Quel que soit , on a
Preuve.
Soit , nous traiterons le cas à part. Par hypothèse , donc
Ainsi
et donc le lemme 2.19 implique
Or (cf. (2.57)) et par hypothèse (et parce qu’on a supposé ), donc , et
Il ne reste qu’à traiter le cas . Posons
Si alors il suffit de reprendre le stratégie précédente. Supposons donc désormais que . Par le lemme 2.19, on a
Or comme , on a
De plus
et par l’hypothèse (2.2). Ainsi et donc
Finalement on a bien également
∎
Nous sommes désormais prêts à conclure. Comme pour tout , on a
Ainsi par hypothèse, on a
et donc par le lemme 2.20 et par définition de
Ceci entraîne
et donc il existe des réels positifs tels que
(2.58) |
et pour tout
(2.59) |
De plus pour tout , on a
notons que les intervalles peuvent être vides. On peut donc définir deux réels positifs ou nuls et tels que
(2.60) |
et
(2.61) |
On a alors
(2.62) |
On rappelle que . Comme , et
il existe deux réels positifs et tels que
et
(2.63) |
Or soit soit
et donc par (2.60)
Finalement comme et sont positifs, dans tous les cas on a
(2.64) |
De la même manière, par (2.61) on établit l’inégalité
(2.65) |
Ces deux dernières inégalités étaient le maillon manquant afin de terminer cette preuve. En effet, en posant
on a et donc par (2.62), (2.63) puis (2.58)
Ainsi
et donc De même, par (2.64) et (2.65), quel que soit on a
et donc finalement est inclus dans un translaté de , ce qui termine la preuve du théorème 1.3.
3 Remarques
Dans le cas symétrique le théorème 1.3 rejoint la conclusion d’un précédent résultat de Candela et de Roton ([1] théorème 4.1).
Théorème 3.1 (Candela et de Roton).
Soit tel que . Soit un ensemble fermé, de diamètre , de mesure non nulle et tel que et . Alors est inclus dans un intervalle tel que .
Même en dehors du cas symétrique, la conclusion du théorème 1.3 est en fait optimale en un certain sens car si nous prenons et pour tout et tout ,
où on rappelle que et
chaque couple d’ensembles respecte les conditions du théorème 1.3 (en particulier on a bien ) et le plus petit ensemble (au sens de l’inclusion) contenant tous les à translation près est bien .
Il est toutefois possible d’améliorer le théorème 1.3 en affaiblissant les hypothèses sur . En ce sens, pour plus de lisibilité nous considérons l’hypothèse alors que dans la démonstration, nous n’utilisons que l’hypothèse plus faible
Références
- [1] P. Candela and A. de Roton. On sets with small sumset in the circle. Q. J. Math., 70(1):49–69, 2019.
- [2] A. de Roton. Small sumsets in : full continuous theorem, critical sets. J. Éc. polytech. Math., 5:177–196, 2018.
- [3] J. H. B. Kemperman. On products of sets in a locally compact group. Fund. Math., 56:51–68, 1964.
- [4] M. Kneser. Summenmengen in lokalkompakten abelschen Gruppen. Math. Z., 66:88–110, 1956.
- [5] I. Z. Ruzsa. Diameter of sets and measure of sumsets. Monatsh. Math., 112(4):323–328, 1991.